Les années Ainsi soit je… et Tour 89
L'Est Républicain, le 30/10/1988
Je n’arrive pas à m’extraire de cet univers des écrivains du XIXè. Toute la littérature que je veux égrener vient de là. Je me sens bien dans les choses un petit peu plus désespérées que désespérantes. Ma vision de la vie est ainsi. Quant à penser que ce soit la bonne thérapie ! |
Rockland, le 01/11/1988
Les journalistes font leur métier comme des cochons. Ils ne respectent rien et surtout pas la personne qu’ils ont en face; Quelquefois, ça peut se passer très mal. Mais en général, on a su parler de moi avec justesse, en bien ou en mal… Je hais les magnétophones parce qu’il y a des mots, des pensées que j’aimerais effacer; avouez que c’est malgré tout une jouissance pour vous… |
Rockland, le 01/11/1988
Je chante pour essayer de donner un sens à ma vie… Ce n’est pas facile ! |
Rockland, le 01/11/1988
Pour les morceaux d’un album, j’ai besoin avant tout d’une musique sur laquelle mes mots vont se greffer. Laurent Boutonnat va en studio, puis j’effectue mon travail d’écriture dans l’isolement. |
Rockland, le 01/11/1988
L’évolution entre les deux albums (Cendres de Lune et Ainsi soit je…) a été pour moi, la découverte de l’écriture… Je me suis aussi découverte, comme si je m’étais moi-même déflorée. C’était presque un viol… Mais c’était fondamental ; si je n’avais pas découvert l’écriture et cette façon de m’exprimer, je pense que je ne serais pas là, aujourd’hui… |
Rockland, le 01/11/1988
Je n’ai pourtant pas le sentiment d’écrire des chansons à messages, si ce n’est pour démolir les tabous ; ce sont des thèmes qui me passionnent. J’agis vraiment comme je l’entends en parlant de sujets souvent occultés, tels la mort, le désespoir… des thèmes rarement abordés par les auteurs français ; Gainsbourg en a usé et abusé… Mais c’est l’un des rares. Je ne calcule pas ce genre d’idées ; ce sont des choses très proches, qui me viennent naturellement. |
Rockland, le 01/11/1988
Depuis que j’ai commencé ce métier, je n’ai jamais agi dans le sens du commercial, jamais fait aucune concession, même si ça n’a pas été facile… |
Rockland, le 01/11/1988
Laurent (Boutonnat) et moi, on s’est rencontrés un jour sur Maman a tort : il m’a vue, assise sur une chaise, et m’a prise pour un petit oiseau un peu psychiatrique, bizarre… Ensuite, ça a été une succession de découvertes entre lui et moi. Il est très difficile de dresser son portrait. Je pense que c’est quelqu’un d’une grande éthique morale, d’une grande droiture… Mais il a aussi ce trait commun avec moi d’être caractériel : il peut passer de moments d’extase à des moments d’anéantissement en deux minutes. |
Rockland, le 01/11/1988
On voudrait nous voir en couple (avec Laurent Boutonnat, NDLR) dans la vie privée, mais ça ne regarde personne. Il a d’autres exigences ; sa vie, c’est le cinéma et la chanson. |
Rockland, le 01/11/1988
Je n’ai pas à me justifier vis-à-vis de ceux qui pensent que je suis un produit conçu par Laurent Boutonnat. Nous constituons un « mariage » parfait de complémentarité, de complicité. Je n’ai pas envie de travailler avec quelqu’un d’autre que lui, mais j’espère pouvoir vivre d’autres expériences. Et si un jour je viens au cinéma, il y aura peut-être divorce. Laurent a un projet de long-métrage ; il a un scénario déjà écrit et j’accepterais consciemment le danger d’être à nouveau associée à lui avec qui je suis dans un confort total. J’aime la façon dont il filme, dont il perçoit les gens et les visages ; il me connaît très très bien et je sais qu’il ne me trahira pas. |