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Critique de l'album Désobéissance par Bambo (04 octobre 2018)





A l'ouverture de son support, Désobéissance laisse présager le meilleur avec cette pochette esthétique et symbolique, où la confiance en soi-même est mise en exergue face à la fatalité incarnée par le crâne et les diktats sociétaux dont le sabre peut être un reflet.


Rolling stone demeure malgré l'habitude de plusieurs mois d'écoute, le titre musicalement le plus novateur dans ce nouvel opus, avec la patte originale de Feder. Il était donc judicieux d'en faire le fer de lance du renouveau. Si son clip annonçait pour moi très clairement la venue de concerts par des références au passé (la capote rappelant la bure du moine 89, la sphère la bulle du tour 96, le rouge prononcé de 2006, l'œil de 2009, la technologie de 2013...), ce n'est qu'après l'interview du jt de TF1 qu'il est devenu évident que le titre lui même y faisait clairement allusion, Mylène rapportant que les Rolling Stone ont inauguré la salle où elle allait jouer.


Sentimentale est très Farmer dans l'âme, rappelant que l'amour redonne le goût à la vie quand on a une attitude plutôt à la mélancolie et aux « failles » (réminiscence de titres comme Bleu Noir). La répétition du « j'ose » fait figure de prémice au titre suivant, annonçant l'affranchissement.


Le titre éponyme Désobéissance fait pour beaucoup office de nouvel hymne farmerien. Mylène y parle de s'assumer (en cela la pochette est emblématique du titre), d'être libre d'« être soi ». On notera l'étonnant emploi du terme de « putain » que l'on appréciera... ou pas. Une incitation en tout cas pour ses fans à ne pas avoir peur d'être ce qu'ils sont. Un beau message même si à titre personnel il me manque un petit quelque chose au titre.


N'oublie pas n'aura pas su convaincre tout le monde, malgré ce qui est pour moi un beau mariage de voix avec LP, sur un thème cher à l'artiste. La perte de l'autre et le manque consécutif se retrouvaient déjà en effet dans les sublimes Regrets, Laisse le vent emporter tout, Pas le temps de vivre, Si j'avais au moins...


Histoires de fesses est le second titre innovant de l'opus, avec un phrasé inédit chez Mylène, et offre le titre « sexuel » de la galette, thème indispensable à chaque album de l'artiste, suite à l'effrontée Libertine de Cendres de lune, la sodomie de Pourvu qu'elles soient douces dans Ainsi soit-je, l'éjaculation précoce de Pas de doute dans L'autre, la mastrubation féminine d'Eaunanisme dans Anamorphosée, l'invitation sexuelle d'Âme-stram-gram dans Innamoramento, la dénonciation du manque d'imagination sexuelle dans Porno Graphique pour Avant que l'ombre, l'ode au godemichet de Sextonik pour Point de suture, l'invitation à accepter la sollicitation sexuelle dans Oui... mais non de Bleu noir etc. Mylene joue avec les allitérations ( le « les riches chiches, les pastiches » me fait juste jubiler) et dénonce une forme de voyeurisme malsain tout en admettant aimer écouter les « histoires de fesses ».


Get up girl est également bigrement efficace. L'air est lancinant, comme une certaine monotonie de la vie qu'évoque justement le texte. Je ne suis pas sûr que le « cogito ergo sum » cartésien en tant que démarche philosophique pour trouver une première et indubitable certitude soit très approprié ici, mais Mylène l'évoque comme dépassement de l'austérité cartésienne pour finalement trouver la vie « so sexy ».


Prière sauf mauvaise interprétation de ma part évoque la maladie, et l'accompagnement de la personne malade jusqu'à ce que le « rideau soit tombé ». Un thème de nouveau triste sur une musique enjouée.


Au lecteur est a priori impopulaire, alors qu'il offre une pause salutaire entre plusieurs titres efficaces, évitant l'écueil d'un ensemble de titres sans réel relief. Mylène lectrice adresse aux lecteurs devenus auditeurs ce superbe texte baudelairien sur un thème qui lui est également cher depuis Lisa-Loup et le conteur, à savoir l'ennui. Ce titre est le troisième ovni que nous apporte cet album (L'horloge avait été magistralement bien mis en musique aussi mais chanté). Et quel délice d'entendre Mylene aussi juste parler, avec sa voix suave et charismatique, et s'adresser au final à nous en ces termes « mon semblable, mon frère ». Un coup de cœur pour moi. Si ce titre a bien un seul défaut, c'est peut être un fort décalage avec l'écriture de Mylene, même si on ne demande pas à celle-ci d'avoir la plume de Baudelaire, et que les textes de Désobéissance sont de meilleure qualité que certains passés.


Des larmes m'a beaucoup surpris par le rythme de ses couplets, que je suis plus habitué à entendre chez des chanteuses de R'n'B, mais qui sied parfaitement à la voix de Mylène. Le refrain est peut-être le plus réussi de tout l'album. Un texte sur la vacuité de la vie, la solitude, et l'attente de l'autre pour y faire face. Un titre parfait.


Parler d'avenir est une exhortation à faire face, et surtout à ne pas se laisser aller, ne pas dépérir, même si cela est plus facile. Il peut rappeler un peu par le thème Il n'y a pas d'ailleurs pour affronter le réel.


On a besoin d'y croire, ou la nécessité de garder espoir, de construire quelque chose. La répétition du « ça ira » est peut-être une référence à la révolution française sur laquelle justement tant de rêves et d'idéaux étaient fondés, ou bien s'agit-il simplement de convaincre son auditeur que tout se passera bien en osant.


Retenir l'eau, seule ballade de l'album, est apprécié par beaucoup mais est le titre qui m'a hélas le moins convaincu. L'eau comme métaphore du temps qui passe ou du bonheur éphémère qui nous échappe est un (peut-être trop) classique. Le texte parle de la communion dans la douleur face à la mort, dans la souffrance, il est de qualité mais c'est la mélodie qui me fait difficilement adhérer, à titre encore une fois personnel bien entendu, même si les écoutes passant je l'apprécie davantage.


Par sa récurrence de thèmes omniprésents dans son œuvre, avec Désobéissance Mylène reste fidèle à elle-même et ne trahit pas son public. Cette constance est doublement louable. Il y a un fil conducteur fondamental à travers ces pistes: être soi comme défi à l'ennui, aux conventions, à l'uniformité, et à la mort. Tout ne peut être dit en aussi peu de mots, le sens des paroles doit être encore creusé pour une meilleure assimilation.


Cet album me plait énormément même s'il ne sera pas mon préféré, car j'adore surtout la Mylene rockeuse totalement absente sur cet opus, mais il est innovant et indubitablement efficace! Je ne doute pas qu'il sera particulièrement bien défendu sur scène, même si j'espère qu'Interstellaires ne sera pas passé aux oubliettes, adorant également cet album magnifique avec des titres peut être un peu plus intemporels. Un grand bravo à Mylène et toute son équipe pour le travail et le bonheur procuré à cette écoute. Rendez-vous sur scène pour coller des images dynamiques à ces titres bien alléchants! 

Bambo

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