En avril 1999,
Mylène est à la Une du magazine
"Elle" pour une interview illustrée par clichés
inédits de Jean-Marie Périer.
Le photographe racontera cette rencontre dans son livre Flash, Photographies 1990-2001 (Filipacchi,
2002).
Il revient sur cette étrange séance photos avec
Mylène dans cette interview.
Pour nos lecteurs qui ne vous
connaîtraient pas encore, pouvez-vous nous parler un peu de
vous ?
En tant que visiteur de ma vie, j'ai exercé plusieurs
"métiers" sans aucun autre plan de carrière
que celui que m'a dicté le hasard... J'ai donc
été photographe dans les années 60,
puis metteur
en scène dans les années 70. Ensuite, j'ai commis
des films publicitaires aux Etats-Unis pendant dix ans. Depuis mon
retour en France en 1990, j'alterne entre les photos, les films
et les livres. Bref, je m'occupe ! Ma vie valait la peine
d'être vécue et je n'en reviens pas
d'être encore là.
Comment avez-vous
rencontré Mylène ?
À Los Angeles, où j'ai eu le
privilège de
déjeuner avec elle. Je ne la connaissais pas et j'ai
été séduit par son incroyable
faculté
d'écoute et d'intérêt qu'elle
sait porter aux autres. Une artiste qui peut parler d'autre chose
que d'elle-même est, croyez-moi, une denrée des
plus
rares. Je n'avais pas rencontré cette qualité
d'attention depuis Simone Signoret.
Comment perceviez-vous
son univers musical ?
J'étais depuis longtemps aux USA et je n'en connaissais pas
grand-chose...
Aviez-vous
regardé le travail des autres photographes qui
avaient déjà travaillé avec
Mylène ?
Non. Je ne connaissais que quelques-uns des très
étonnants clips qu'elle avait tournés avec
Laurent
Boutonnat. Leur sens commun du spectacle et leur obsession du
détail m'avaient effectivement beaucoup plu.
Qui a eu l'initiative de
la célèbre séance photo de 1999 ?
C'est le journal "Elle" qui me l'avait
proposé. J'y travaillais alors parce que ma sœur,
Anne-Marie (qui est également l'épouse de Michel
Sardou, ndlr), le dirigeait.
Mylène est
très exigeante en ce qui concerne son image.
Vous avait-elle donné des instructions
particulières ?
Elle ne m'avait pas donné d'instructions, elle
m'avait seulement prévenu gentiment qu'un objectif
la rendait marteau et que l'acte d'être
photographiée la transformait en quelqu'un d'autre.
C'était vrai, rien à voir avec la personne au
charme si attractif. C'était une sorte d'ovni silencieux qui
évoluait sur son coussin d'air en
évitant les regards. Elle s'asseyait joliment comme un
oiseau timide en me lançant de temps en temps un regard qui
disait qu'elle ne détesterait pas que tout ça
s'arrête. De toute manière, j'étais
séduit, puisque je n'ai d'attirance que pour les
gens qui n'aiment pas se faire photographier.
De cette
séance, on ne connaît que quelques photos, alors
que vous avez dû en faire beaucoup. Que sont devenues les
autres ?
Prévenu de son appréhension, j'avais
décidé d'exécuter ces photos en
Polaroid
18x24, afin qu'elle puisse voir les images tout de suite.
Après chaque pose, elle regardait la photo attentivement,
puis
sans dire un mot, elle la déchirait. Cette
franchise-là,
qui eut pu énerver un photographe "normal", me
plaisait énormément. J'ai toujours
considéré que la personne
photographiée a tous les
droits et que si elle est devenue cette icône
adulée des
gens, c'est grâce à des obsessions qui lui sont
propres et qui ne regardent qu'elle. Donc après chaque
destruction d'une image, j'en faisais une autre. Sur les
cinquante qu'on a faites cet après-midi-là, il en
reste quelques-unes. Et c'est très bien comme ça.
Combien de temps cette
séance a-t-elle duré au final ?
L'après-midi.
Quel souvenir en
gardez-vous ?
Le souvenir d'une franchise qui me donnait envie de lui faire plaisir.
Dans votre livre, vous
évoquiez votre surprise devant le
comportement de Mylène lors de cette séance.
Pensez-vous
qu'elle agisse ainsi avec tous les photographes ?
Oui, je le suppose. Ou alors, je lui faisais peut-être peur.
Après tout, on ne se connaissait pas.
Peter Lindbergh disait
qu'avec lui, elle avait mis beaucoup de
temps à se sentir en confiance et qu'au fur et à
mesure de la séance, elle devenait de plus en plus belle.
Avez-vous eu le même ressenti en la photographiant ?
J'aime beaucoup Peter Lindbergh, mais pour moi, ça,
c'est une phrase de photographe. Je répugne à
théoriser sur les photos que je fais.
Avez-vous
gardé contact avec elle ?
Oui, nous nous sommes croisés et j'ai même eu
envie
de travailler avec elle sur autre chose. Mais ça, c'est
une autre histoire...
Pouvez-vous nous parler
un peu de la séance photo
réalisée pour Alizée ? Est-ce
Mylène qui en
a eu l'initiative ? Etait-elle présente également
?
Comment s'est comportée Alizée ?
C'est moi qui avait proposé à "Paris Match" de la
mettre en couverture avec Henri Salvador, du temps
où j'avais encore de l'estime pour lui. La plus
jeune et le plus vieux des chanteurs m'avait semblé
être une belle idée. J'ai donc profité
de
cette séance pour faire quelques photos d'elle.
C'était une jeune fille qui se comportait comme telle.
Seriez-vous
prêt à refaire une séance avec
Mylène un jour ?
Elle a mon numéro et la voir est toujours un enchantement.
Donc
c'est quand elle veut, même sans faire de photos.
Quels sont vos projets
actuels ?
Rester vivant encore une quinzaine d'années...