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Mylène Farmer - Interview - Diverto - Mai 2024





Interview publiée dans le magazine "Diverto" vendu en supplément de nombreux quotidiens régionaux (entre le 03 et le 05 mai 2024). Elle est essentiellement consacrée au cinéma et au film Blue et Compagnie dans lequel Mylène double la voix du personnage Blossom. Les autres actualités de Mylène, à savoir la sortie de l'album Remix XL quelques jours avant et les futurs concerts Nevermore au Stade de France sont également évoquées.


Diverto : Le cinéma a une place prépondérante dans votre oeuvre. Quelle relation avez-vous avec le 7è art ?
Mylène Farmer : C'est essentiel à ma vie, tout comme la musique. Nietzsche disait : "Sans la musique, la vie serait une erreur". Je me permets de rajouter : sans le cinéma aussi. Mais il n'a pas vécu assez longtemps pour le découvrir.

Que pouvez-vous nous dire sur votre personnage de Blossom, dans le film Blue & Compagnie ?
Blossom est douce et espiègle. Elle aide Bea, la jeune héroïne du film, et fait en sorte que chaque adulte renoue avec son ami imaginaire d'autrefois. Blossom est aussi une délicate danseuse, toujours très attentionnée. Elle est l'amie imaginaire de l'attachante grand-mère

L'enfance est un thème récurrente dans votre oeuvre. Qu'est-ce qu'elle vous inspire ?
Quand je pense à mon enfance je suis en terre inconnue. Je n'ai pratiquement aucun souvenir. Tout juste quelques bribes. Cette enfance oubliée est un monde imaginaire source d'inspiration et d'angoisse aussi. Je ne viens pas de mon enfance mais je cherche le chemin pour y retourner.

En fil rouge, Blue & Compagnie souligne l'importance de garder un lien avec l'enfant qui est en soi. Quel est le vôtre ?
La spontanéité et ma capacité d'émerveillement toujours intacte. L'intuition aussi, qui est pour moi du domaine de l'enfant. C'est la recherche de l'évidence avant que la raison ne s'en mêle.

Quelles émotions avez-vous ressenties en découvrant le scénario ?
Paramount m'a contactée pour me proposer de prêter ma voix à "cette" papillon... J'étais très enthousiaste et curieuse. J'ai donc vu en projection le film, presque achevé. Et c'était irrésistible. C'est un film tendre, émouvant, drôle aussi !

Aviez-vous un ami imaginaire ?
Je n'en ai malheureusement pas le souvenir. Mais j'ai des amis qui ont beaucoup d'imagination !

Que saviez-vous de John Krasinski (le réalisateur du film Blue & Compagnie, ndlr) ?
The Office est une série culte, que ce soit la version anglaise ou américaine. Personnages excentriques, humour décalé, dialogues crus... C'est hilarant. Le casting est remarquable. Et les regards caméra de John Kravinski sont irrésistibles.

Vous doublez en français le personnage de Phoebe Waller-Bridge, actrice britannique incontournable. Étiez-vous familière de son travail ?
Elle est formidable dans Fleabag. La série déborde d'humour noir et de piquant. Son regard impertinent fait un bien fou. Elle tord le cou à tous les préjugés avec une telle liberté d'esprit. Et bien sûr Killing Eve, l'humour noir encore mais aussi l'amour entre ces deux personnages féminins tellement atypiques qui forment un couple qui tente de s'épanouir dans un quotidien meurtrier. C'est brillant.

On vous a récemment retrouvée dans deux blockbusters. Des univers assez éloignés des films indépendants avec lesquels on aurait pu vous imaginer collaborer. Qu'est-ce qui vous plaît dans ces films à grand spectacle ?
Le merveilleux, le fantastique, l'extraordinaire, la poésie, parfois, l'onirisme. Tout ce qui donne envie du grand écran. C'est un terrain de jeux formidable où tout est possible. Et j'aime aussi infiniment l'animation, du Voyage de Chihiro au Roi et l'Oiseau en passant par Ratatouille, Wall-E et tous ces chefs d'oeuvre que j'oublie. Le cinéma indépendant m'intéresse aussi beaucoup. C'est un travail plus intime.

Que ce soit dans vos clips ou cinéma, qu'arrivez-vous à montrer en images que vous ne pouvez pas exprimer en musique ?
Je crois que la musique permet d'exprimer une infinité de sentiments quand l'image propose un cadre pour l'imagination. Dans mes clips, j'aime proposer une interprétation de mes chansons, la mienne ou celle du réalisateur. Cela donne une perception de mon travail. Mais je pense que le pouvoir universel de la musique est comparable à celui du parfum, que chacun s'approprie avec sa propre histoire intime.

Y a-t-il un rôle ou un genre de film que vous aimeriez encore explorer ?
Je n'ai aucune limite. C'est une question d'écriture et de rencontre. Et j'ai des projets...

Regardez-vous la télévision ou les plateformes ?
Oui, je regarde beaucoup de films, de documentaires et de séries sur les plateformes. Je vais beaucoup au cinéma aussi. C'est toujours un moment magique quand la salle plonge dans l'obscurité. Quant à mon dernier coup de coeur : Ripley. C'est une série adaptée du roman de Patricia Highsmith. Un ovni. Il y a ce parti pris du noir et blanc, magnifique. Il y a de très longs moments de silence, une lenteur assumée qui font tout le piment de cette série. Vraiment impressionnant.

Vous venez de sortir un album de remixes de vos plus grands tubes. Comment avez-vous choisi les artistes ?
Depuis mes débuts, j'ai toujours aimé proposer des versions différentes de mes singles et autres titres moins connus. Soit en faisant appel au savoir-faire des producteurs et ingénieurs du son qui m'entourent ou encore, comme aujourd'hui, en contactant des artistes ou musiciens que j'aime. Pour ce troisième album de remixes, j'ai kidnappé mon frère Michel qui connaît, bien sûr, mes goûts et qui a une culture musicale très étonnante, très pointue. C'est un passionné ! C'est aussi un fidèle de concerts, de festivals. La musique est toute sa vie (je lui avais d'ailleurs confié la bande-son de l'avant-concert Nevermore). Tout naturellement, le choix des remixeurs s'est axé sur mes goûts musicaux, influences et inspirations, aussi bien musique que cinéma, allant de la New Wave aux dernières tendances électro sous influence des années 1980 à 2000.

Ont-il eu des directives particulières ?
C'était important pour moi de laisser beaucoup de liberté aux remixeurs en leur faisant totalement confiance. Le seul mot d'ordre était de respecter au maximum le format chanson afin que ces remixes puissent s'écouter comme un album à part entière, à tout moment de la journée. J'ai également réinterprété mes morceaux les plus anciens en studio. Ce projet était ardu mais passionnant à faire.

Dans quelques mois, vous serez sur scène. Après 30 ans de carrière, ressentez-vous de l'appréhension ? Comment préparez-vous ce retour ?
Oui, j'ai toujours une appréhension à monter sur scène. Je crois que ce sentiment ne me quittera jamais. Ce sont les deux concerts au Stade de France qui ont été reportés l'année dernière lors des émeutes. La préparation est un peu particulière puisqu'elle consiste essentiellement à retrouver les équipes de la tournée des stades et à remettre la gigantesque machine en route.

Avez-vous un nouvel album actuellement en préparation ?
Pour l'instant non... J'étais occupée par d'autres projets. Et il faut du temps pour se recharger et créer à nouveau. Mais tout peut changer si vite !

On vous a vue collaborer avec de nombreux artistes comme Sting, Woodkid, AaRON ou encore Moby... Est-ce qu'il y a de nouveaux artistes avec lesquels vous aimeriez travailler ?
Il y aussi le groupe Archive et Muse. J'aimerais travailler avec David Bowie et Amy Winehouse ! S'ils pouvaient ressusciter... J'aime également beaucoup Dave Gahan du groupe Depeche Mode. Il est animal sur scène, son timbre de voix unique, les chansons du groupe puissantes. Il y a aussi des artistes comme Lana Del Rey et Billie Eilish qui sont uniques, insaisissables, à fleur de peau.