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Mylène Farmer - Interview - Europe 2 - 21 décembre 1995






Interview diffusée sur Europe 2 le jeudi 21 décembre 1995 entre 19h30 et 20h30.

À noter que dans cette interview Mylène n'annonce pas son retour sur scène alors qu'elle l'avait fait dans l'émission "Studio Gabriel" enregistrée le 12 décembre et diffusée sur France 2 le 14 décembre. On peut donc supposer que cette interview pour Europe 2 a été enregistrée avant.

 
Frédéric Ferrer : Encore une fois, ravi de vous retrouver sur Europe 2, en compagnie donc, ce soir, de Mylène Farmer ! D'ici 20h30, vous allez gagner des dizaines de cadeaux grâce à Europe 2. Et puis vous allez mieux faire connaissance avec l'une des plus belles représentantes de la chanson française, et l'une des plus mystérieuses aussi. Alors mi-ange, mi-démon, notre Mylène nationale, sulfureuse ou douce ? Toutes les questions que vous vous posez, elle y répondra ! A l'occasion de l'interview exclusive qu'elle a accordée à Europe 2 il y a quelques jours ! Et en plus, elle vous dira tout dans un Deux minutes chrono très... très intime ! Vous ne le savez peut-être pas, elle est née le 12 septembre 1961 à Montréal et elle y a passé toute sa jeunesse avant de rejoindre la France. Alors première question au sujet de son enfance : Mylène, avez-vous des souvenirs de notre belle province, le Québec ?
Mylène Farmer : Très, très peu ! Très vagues, si ce n'est que j'ai le souvenir de la neige, en tout cas ce goût de la neige, probablement de sa blancheur, (rires) de sa froideur et, je crois, quelques odeurs, quelques goûts. Le sirop d'érable est un goût que j'ai redécouvert en France, et c'est... autant de choses qui font appel à des souvenirs. Sinon, j'avoue que c'est à peu près tout !


Diffusion de Pourvu qu'elles soient douces.


Frédéric Ferrer : Eh oui, notre rouquine de choc et de charme, Mylène Farmer, est notre invitée exceptionnelle, ce soir, sur Europe 2 ! Mylène, merci d'avoir choisi Europe 2 pour vous confier ! Alors là, on va parler cinéma et du film Giorgino que vous avez fait l'année dernière avec Laurent Boutonnat.  Quelle conclusion tirez-vous de cette expérience en grand écran ?
Mylène Farmer : Heu... Aucune conclusion ! Si ce n'est que c'était un souvenir... j'allais dire de poids, (rires) dans tous les sens du terme ! C'était un moment qui était parfois difficile, un moment qui a été important. Maintenant, quant à des leçons pour le futur, non, aucune. C'est quelque chose que j'ai aimé faire, en tout cas.


Frédéric Ferrer : Comment ça vous est venu ? C'est quelque chose que vous aviez envie de faire ?
Mylène Farmer : Depuis très longtemps, avant même la chanson, puisque c'est la chanson qui est venue à moi. J'avais envie de faire ce métier. Théâtre, cinéma... en tout cas l'idée de jouer et d'interpréter des personnages. Maintenant, une fois de plus, c'est la chanson qui est venue à moi !


Frédéric Ferrer : Oui... Parce que jouer la comédie, c'est quelque chose qui vous plaît, que vous aimez faire ?
Mylène Farmer : Oui ! J'ai pensé que c'était quelque chose dont j'avais réellement besoin. Maintenant j'en parlerais d'une façon un petit peu plus détachée, probablement. C'est... C'est parfois un plaisir.


Diffusion de Mylène s'en fout.


Frédéric Ferrer : Merci d'être avec nous sur Europe 2 ! Le nouvel album de Mylène Farmer, Anamorphosée, n'a pas failli à sa réputation en matière de mise en scène de clips. D'ailleurs, Mylène, vous nous avez dit tout à l'heure que vous aimiez jouer la comédie. Le premier extrait de l'album, XXL, il déménage, comme le clip, d'ailleurs, qui, si on peut dire, marche à la vapeur ! Alors on aimerait en savoir un petit peu plus sur les coulisses du tournage. Racontez-nous !
Mylène Farmer : C'est la première fois donc que je travaillais avec ce réalisateur allemand...


Frédéric Ferrer : Marcul Nispel ?
Mylène Farmer : Marcus Nispel. Je lui ai donné la chanson, il connaissait mes clips. C'est quelqu'un qui est... qui s'intéresse beaucoup au travail des autres. Donc il connaissait mon univers et... et j'avoue que je lui ai laissé carte blanche ! Parce que j'avais envie d'avoir, justement, cette fois, quelqu'un d'un horizon différent qui pouvait, lui, m'apporter quelque chose. Et il a eu, donc, cette idée du... de cette figure de proue devant le train...


Frédéric Ferrer : ... de la locomotive, oui...
Mylène Farmer : ... de cette locomotive. Et... et j'avoue que j'ai tout de suite répondu :"oui" parce qu'elle me semblait... belle et intéressante. Difficile aussi ! (Rires) Le tournage a été difficile !


Frédéric Ferrer : Alors racontez-nous le tournage ! Parce que là, c'est... Alors est-ce que c'est... ? J'avais reçu Daran et je lui avais demandé si... quand on le voit sur une espèce de lit se balader dans Paris... si ça avait été truqué. Il m'avait dit : « Non ! C'est effectivement le lit qui bougeait et j'ai pris beaucoup de risques ! ». (Frédéric Ferrer parle ici du chanteur Daran, qui, en 1995, a sorti le titre Dormir dehors. Dans le clip, nous voyons le chanteur assis dans un lit qui 'roule' tout seul dans les rues de Paris, ndlr) Alors là, la locomotive... ! Vous bougez avec la locomotive ? Elle ne bouge pas ?
Mylène Farmer : Si, la locomotive bouge ! Parfois elle bougeait très vite. J'avais, de toute façon, un harnais pour me protéger, pour me maintenir contre le train. Quant aux difficultés de ce tournage, elles résident en ce sens que je ne pouvais pas bouger de cette toute petite plate-forme, que le train lui-même était très, très chaud, que dehors, il faisait très, très chaud. Mais bon, c'est autant de choses qui ne sont pas très intéressantes pour le public ! (Rires)


Frédéric Ferrer : Non, non ! Si, si ! Si, si !
Mylène Farmer : Non, des conditions difficiles parce qu'on est bloqué en un endroit et qu'il faut tenir, tenir, tenir, tenir pour que la caméra puisse prendre le plus de choses possibles !


Diffusion de XXL.


Frédéric Ferrer : Europe 2 fête Noël avec quatre jours d'avance, puisque Mylène Farmer est notre invitée, votre invitée sur Europe 2 ! Là c'était l'amour en grande taille, en version XXL ! Mylène, quand on regarde attentivement le clip de la chanson, même si, pour une fois, il n'est pas signé Laurent Boutonnat, on reconnaît quand même une touche 'farmerienne', voire 'boutonnesque'...
Mylène Farmer : Oui ! Oui, c'est vrai ! Peut-être...


Frédéric Ferrer : Les visages de ces gens... hein ?
Mylène Farmer : Je ne sais pas... Voilà, je parlerais volontiers, effectivement, des choix de casting. Des enfants, des personnages en général...


Frédéric Ferrer : Quand j'ai vu le chef de gare, et tout ça...
Mylène Farmer : Oui... Quand j'ai vu toutes ces personnes, j'ai pensé, moi, à l'époque de Désenchantée, quand nous avons fait ce clip et ce casting. Il y a des ressemblances dans le choix des visages. Quant à une manière de travailler, tous les deux (Laurent Boutonnat et Marcus Nispel, ndlr) sont très rigoureux. Et, je crois, ont une grande maîtrise et de l'image et d'un plateau. Et ont tous les deux en commun, donc, cet amour pour le cinéma et l'image, tout simplement...


Diffusion de Désenchantée.


Frédéric Ferrer : Extrait du quatrième album de Mylène Farmer, L'autre... (il s'agit en fait du troisième album studio de Mylène, ndlr) C'était Désenchantée ! Et n'oubliez pas que d'ici 20h30, Mylène, on vous passera sur le gril pour un Deux minutes chrono ! Et puis qu'on vous offrira encore des tshirts, des calendriers, des albums Anamorphosée et plein d'autres choses ! Mylène, vous êtes partie pendant près d'un an aux Etats-Unis. Alors qu'est-ce que vous êtes allée chercher là-bas, sous le soleil de la Californie ? Et puis, surtout, qu'est-ce qui vous a motivée ?
Mylène Farmer : L'envie de voyage, et aussi l'idée que je connaissais quelques personnes là-bas, donc c'est une transition un peu plus facile. L'envie d'espace, de soleil, je crois. Et d'essayer d'y trouver une liberté de tous les jours. A savoir pouvoir, moi, évoluer dans la ville... sans être perturbée par l'idée du regard qui, parfois, peut déranger. Voilà, autant de choses qui sont, là encore, dans le fond, très banales. Mais moi, j'y ai trouvé une liberté. Et puis découvrir des choses, découvrir un paysage, découvrir des personnes et puis des choses, des choses très, très futiles ! Des gestes de tous les jours que j'avais peut-être oubliés... pendant de longues années (petit rire), parce que j'ai eu ce sentiment de m'être, moi, un peu repliée et renfermée sur moi-même. Voilà, des idées que j'évoquais très, très futiles... C'est faire ses courses, par exemple, aller dans des grands supermarchés. Ça peut paraître très, très bête, mais j'y ai pris un réel plaisir !


Diffusion de California.


Frédéric Ferrer : Mylène, merci d'être toujours là avec nous ! Avec près de cinq millions d'albums vendus, un démarrage en flèche pour le dernier, Anamorphosée, on peut dire que tout vous réussit. Après ce séjour aux Etats-Unis, vous n'avez pas envie de partir à la conquête de l'Ouest ?
Mylène Farmer : Non ! Je n'ai pas, j'allais dire, cette ambition. Je ne pense pas avoir en moi cette envie... en tout cas que de retravailler... et je n'ai pas ce rêve américain. Et puis je crois que c'est d'abord plus du domaine de l'utopie. Parce que pour pénétrer un tel pays, il faut parler... non pas parler, mais s'exprimer en langue anglaise... donc chanter dans cette langue, sinon on ne touchera qu'un très, très faible pourcentage. Donc j'avoue que ce n'est pas un moteur pour moi.


Frédéric Ferrer : Non, je disais ça parce que vous avez à peu près tout prouvé ! Ça marche à chaque fois ! Donc je me dis peut-être tenter l'aventure américaine ! Chanter en anglais non plus, ça ne vous fait pas envie ?
Mylène Farmer : Non, parce que j'écris, d'abord, en français, et qu'il m'est très difficile d'écrire en anglais. Je peux le parler, je peux converser. Maintenant, maîtriser une langue, c'est une autre histoire ! C'est vrai que l'idée que de prêter ma plume à quelqu'un d'autre m'est très, très insupportable. Donc c'est vrai que j'ai du mal à envisager ce passage !


Diffusion de L'Instant X.


Frédéric Ferrer : Bonne soirée avec nous ! Mylène Farmer, effectivement, sous toutes ses formes, sous toutes ses coutures, c'est sur Europe 2 ! Tout ce qu'elle n'avait jamais dit, c'est maintenant, dans un questionnaire vérité où tout peut arriver. Alors Mylène, vous êtes plutôt une
couche-tard ou une couche-tôt ?
Mylène Farmer : Je crois que je suis plutôt quelqu'un du matin.


Frédéric Ferrer : Bon... Et d'où vous vient l'inspiration ?
Mylène Farmer : Probablement, très banalement, de ma vie. Parfois celle des autres. En tout cas d'un regard porté sur... sur... j'allais dire le monde en général, en tout cas mon monde à moi.


Frédéric Ferrer : Est-ce que vous avez des regrets après un an passé aux Etats-Unis ?
Mylène Farmer : Malheureusement, j'ai été obligée de laisser derrière moi mon petit singe parce qu'on ne peut pas voyager avec un animal comme ça !


Frédéric Ferrer : Bon et les meilleurs souvenirs, alors ?
Mylène Farmer : Des rencontres. Mais bon, ce serait peut-être d'ordre... intime, donc difficile pour moi d'en parler ! (Petit rire)


Frédéric Ferrer : Qu'est-ce qui tourne sur votre platine, actuellement ?
Mylène Farmer : J'écoute beaucoup Hotel California. (titre du groupe Eagles, sorti en 1976, ndlr) Sinon j'écoute beaucoup Bob Marley en ce moment. J'écoute Neil Young...


Frédéric Ferrer : A quel moment de la journée écrivez- vous ?
Mylène Farmer : Je n'ai pas d'heure !


Frédéric Ferrer : Il n'y a pas d'heure ?
Mylène Farmer : Je n'ai pas de moment préféré, non. J'écris dans... j'allais dire dans un état d'urgence. A savoir quand j'ai un album, sinon j'avoue que je n'ai pas la plume facile.


Frédéric Ferrer : Bon, est-ce que vous avez envie de refaire du cinéma ?
Mylène Farmer : Oui, je crois, oui...


Frédéric Ferrer : Est-ce que vous avez envie de remonter sur scène bientôt ?
Mylène Farmer : J'y pense ! Je n'ai... je n'ai pas encore la réponse. Je me donne le temps pour ça !


Frédéric Ferrer : Anamorphosée, c'est un album plus positif, quand même ?
Mylène Farmer : Peut-être, oui ! C'est peut-être l'idée que... que l'instant présent est quelque chose de... en tout cas quelque chose, pour moi, d'important... plutôt que de se... et de se laisser détruire par son passé et par l'idée du futur ou d'un futur hypothétique.


Frédéric Ferrer : Bon, il est presque 20h30, Mylène ! Quand vous êtes dans la cuisine, qu'est-ce que vous vous faites à dîner ?
Mylène Farmer : Très peu de choses ! J'aime... j'aime beaucoup la nourriture japonaise.


Frédéric Ferrer : Oui... Tout ce qui est sushis...
Mylène Farmer : Hmm, hmm... Donc je peux cuisiner un petit peu japonais... Mais dans le fond, ce sont des choses qu'on plonge dans l'eau bouillante, donc... (Rires de Mylène et Frédéric Ferrer)


Diffusion de Regrets.


Source retranscription : Styx Magazine spécial Mylène Farmer - Référentiel des radios - Editions Sunset Publishing - 2013