Les brèves

Duel

MF 24/7 : les brèves

Désenchantée Barbara Pravi...
Ainsi soit je? Instrumentau...
Bambi Préco DVD
Aaron à la Star Academy..
Sandrine Kiberlain (suite)
Julien Doré

Duel Costumes

Voter
1999
Dominique Borg (California)
Voter
2006
Franck Sorbier (California)

Résultat du vote

48%
52%
X

Mylène Farmer - Interview - Le Point J - TVA - 09 novembre 1999






En plein Mylenium Tour, Mylène accorde un entretien pour le talk-show québécois de Julie Snyder (qui viendra, quelque temps plus tard s'essayer à une carrière à la télévision française, sans réel succès). Il faut dire que, à l'époque, il avait été fortement question que la chanteuse aille donner quelques shows outre-Atlantique. Mais ça ne s'est finalement pas fait. Curieusement, l'entretien ne sera illustré qu'avec des images du Tour 96. Autres curiosités de l'interview : Mylène y rit vivement... et fume ! C'est la seule télé, à ce jour, où la chanteuse s'est autorisée ce 'vice'.

Le sujet commence par un rapide patchwork audio et vidéo, mêlant des extraits des différentes tournées et des différents clips de Mylène, mais aussi des images dans les coulisses de son Mylenium Tour, avant d'entrer en scène.

Puis on découvre l'animatrice canadienne, à l'accent très prononcé, en face de Mylène, toutes deux assises sur des canapés en cuir noir, dans ce qui semble être une loge. La chanteuse porte une longue jupe écrue et une veste en jean bleu.



Julie Snyder : Vous avez un succès phénoménal. Grasset disait que la réussite c'est souvent la revanche sur le bonheur. Est-ce que ça s'applique à vous ?
Mylène Farmer : Probablement, oui. (rires) Oui, c'est très difficile d'être heureux.


Julie Snyder : Est-ce que quand vous étiez petite, vous vous disiez : "Quand je serai grande, je serai chanteuse" ?
Mylène Farmer : Non, du tout. Je crois que je ne me suis jamais posée cette question. En tout cas, je n'en ai pas le souvenir. Je ne sais pas.


Julie Snyder : Et à quel moment vous avez eu envie de devenir chanteuse ?
Mylène Farmer : C'est un hasard. Je voulais être actrice, donc j'ai pris des cours de théâtre, mais ça c'était plus tardivement. Et puis, c'est une rencontre qui a fait que j'ai commencé la chanson.


Julie Snyder : Et puis, vous vous êtes dit : "Je me lance là-dedans" ?
Mylène Farmer : Là, je crois que c'est la vie qui m'a happée. En tout cas, je me souviens m'être dit : "Je sais que c'est ce que je veux faire". Surtout à travers l'écriture. C'est quelque chose qui m'a tout de suite beaucoup aidée et intéressée.


Extrait de Rêver pendant le Live à Bercy qui se poursuit pendant les deux questions suivantes.


Julie Snyder : Votre spectacle est très spectaculaire, est un grand déploiement. Ça ne ressemble à rien (sic). Autant c'est très spectaculaire, autant c'est très, parfois très émotif, très intimiste. Quand vous vivez les moments d'émotion, on sent la foule frissonner avec vous, et vous pleurez même en interprétant certaines chansons. Dans quel état êtes-vous ?
Mylène Farmer : D'émotion intense. C'est quelque chose à la fois qui consume, et à la fois c'est un partage.


Julie Snyder : Est-ce que vous pleurez systématiquement à chaque spectacle ?
Mylène Farmer : Ecoutez, je ne sais pas. Je ne réfléchis pas à tout ça. Si ce n'est qu'il y a des chansons, oui, dont le texte me touche profondément. Et puis c'est vrai que l'écoute que j'ai, qui est d'une grande, grande qualité, d'une grande chaleur, me provoque aussi, me suscite des émotions.


Fin de l'extrait de Rêver.


Julie Snyder : Quand on assiste à votre spectacle, on a l'impression d'être à la messe, à une cérémonie (sourire de Mylène). Et après la cérémonie, après la communion avec le public, parce que c'est très, très intense, est-ce que vous ressentez un vide après, après cette grande force ?
Mylène Farmer : Je le ressens fatalement. Mais c'est plus après une... quand une tournée est terminée, que c'est vraiment le grand trou noir. Là, j'ai la chance d'être accompagnée et entourée. Donc c'est vrai que le plongeon est assez bref. Maintenant, la nuit parfois (rire) propose d'autres choses.


Julie Snyder : Les paupières ont du mal à se fermer ?
Mylène Farmer : Oui, beaucoup de mal, oui.


Julie Snyder : Qu'est-ce que vous faites dans ce cas-là ?
Mylène Farmer : Je crois que j'ai le spectacle qui revient en boucle. Ce que j'ai considéré comme étant des erreurs. Je pense à des textes. Je pense à des mouvements, à tout ce qui fait le spectacle.


Extrait de Désenchantée lors du Live à Bercy.


Julie Snyder : Vous arrivez à tout gérer. Par exemple, le spectacle, c'est vous qui l'avez conçu.
Mylène Farmer : C'est moi, c'est moi et beaucoup d'autres. Je crois que faire les choses seule, c'est quelque chose qui ne m'intéresse pas. J'aime le dialogue, que ce soit avec un, deux, dix... Maintenant, donner naissance à quelque chose et puis après faire appel à des gens de talent autour de moi.


Julie Snyder : Non, mais vous le portez sur vos épaules.
Mylène Farmer : (sourire) Je le porte sur mes épaules oui, en tout cas au moment X, c'est-à-dire quand je rentre sur scène. C'est vrai qu'il n'y a plus que moi, mais aussi des danseurs et des musiciens, et une technique. Mais c'est vrai que si moi je flanche, le spectacle n'est plus.


Extrait de XXL lors du Live à Bercy.


Julie Snyder : Vous êtes née au Québec. (Mylène confirme) Et où vous avez vécu exactement au Québec ? En région ? A Montréal ?
Mylène Farmer : Une province du Québec, je ne sais plus. (silence) Je me souviens simplement du nom Sainte-Marcelline, si ça peut vous aider. (rire) Le reste, je ne sais pas.


Julie Snyder : Vous alliez chez les sœurs, chez les Marcellines ?
Mylène Farmer : Oui.


Julie Snyder : Et pourquoi vos parents, qui sont quand même français... Parce que vos parents ne sont pas québécois - on dit souvent que vous êtes québécoise ; vous l'êtes parce que vous êtes née au Québec, vous avez un passeport canadien. (Mylène confirme) Mais pourquoi vos parents étaient venus au Québec ?
Mylène Farmer : Pour raison professionnelle.


Julie Snyder : Et ils sont retournés en France aussi pour raison professionnelle ? (Mylène confirme) Et est-ce que vous étiez contente de retourner en France ?
Mylène Farmer : Je ne peux pas... Je pourrais mentir. Je n'ai pas ce souvenir là non plus ! (rire)


Julie Snyder : Mais quand même, pour une petite fille, de passer du Québec à la France, donc c'est une autre culture, c'est... Avez-vous eu un choc en arrivant ici ?
Mylène Farmer : Ecoutez, on m'a dit, alors là je vais vous répéter ce qu'on m'a dit, oui, que c'était quelque chose d'assez difficile. Maintenant, moi-même, je n'en ai pas le souvenir.


Extrait de Vertige lors du Live à Bercy.


Julie Snyder : Il y a des tableaux qui sont très sexy. Vous êtes quand même, peut-être que vous n'aimerez pas l'expression-, vous êtes un sex-symbol...
Mylène Farmer : Je ne sais pas. (rire)


Julie Snyder : Non mais que vous le sachiez ou non. (rire de Mylène) Vous êtes très belle. Est-ce que vous, vous vous trouvez belle. Quand vous vous voyez sur scène ou quand vous regardez les vidéos ?
Mylène Farmer : Non, non. Ce sont des moments difficiles pour moi (rire). Je préfère voir l'ensemble, voir si le moment est beau, riche, émouvant, mais quant à moi, me polariser sur moi, non, c'est toujours très difficile.


Julie Snyder : Pourquoi c'est quelque chose de si difficile de parler de vous, de penser à vous...
Mylène Farmer : (la coupant)  Il n'y a pas de réponse.


Julie Snyder : ... de vous regarder ?
Mylène Farmer : Je ne sais pas.


Extrait du clip Libertine.


Julie Snyder : Est-ce que vous êtes aussi libertine que dans vos clips ?
Mylène Farmer : Je... Là... Je sais que cette question revient souvent, je ne peux pas répondre à cette question-là (rire).


Julie Snyder : Ah ben comment je pourrais la formuler ? (Mylène, qui tient désormais une cigarette, fixe silencieusement l'animatrice du regard, tout en lui souriant) Vous me regardez et : "Allez, rame ! Rame, ma vieille ! Je t'écoute !" (rires).
Mylène Farmer : Passez à une autre question, en tout cas (rires).


Julie Snyder : Ah, c'est ça ! Ma prochaine question, euh : est-ce que vous aimeriez être comme dans vos clips ?
Mylène Farmer : Vous savez, une chanson, c'est une chanson. (sur un extrait du clip Sans contrefaçon) Après, on a envie d'y mettre des images, de raconter une histoire à travers cette chanson. Donc c'est un moment choisi, un morceau choisi. Vous dire que si j'exprime "Sans contrefaçon, je suis un garçon", si vous me posez la question : "Est-ce qu'aujourd'hui, vous avez toujours envie de mettre un mouchoir dans votre pantalon ?", je vais vous dire : "Non, c'était le passé". Maintenant j'ai exprimé ce moment-là. Ça ne veut pas pour autant dire que je dois véhiculer ou cette image ou ce sentiment toute ma vie.


Extrait de Sans contrefaçon lors du Live à Bercy.


Julie Snyder : Je vous oblige en ce moment à parler de vous, parce que je n'ai pas le choix puisque je fais une interview sur vous, et qu'on ne va pas parler du canapé en cuir sur lequel vous êtes assise (rires) !  Est-ce que vous avez l'impression, par exemple, d'être chez le dentiste et qu'on va vous arracher une dent ?
Mylène Farmer : Ce n'est pas à ce point-là, mais c'est une sensation de malaise, oui... (rires).


Extrait du clip Comme j'ai mal.


Julie Snyder : Vous le dites vous-même : vous avez une araignée en vous. Vous êtes une petite ‘bibite'. (Mylène reste silencieuse, perplexe, puis fait les gros yeux et rit) Non mais euh... Parce que pour moi, vous êtes une petite ‘bibite' dans le sens où...
Mylène Farmer : (la coupant) Ça veut dire quoi ? (elle éclate de rire, et porte sa cigarette jusqu'au cendrier posé par terre)


Julie Snyder : Une ‘bibite', ça n'existe pas en France ? Y'a pas de mot ‘bibite' ici ? (Mylène est morte de rire) En France, une ‘bibite', c'est... Euh, en québécois, une ‘bibite' c'est un petit moustique (Mylène éclate de rire en tenant sa cigarette, tandis que l'animatrice mime l'insecte), genre avec des pattes.
Mylène Farmer : D'accord.


Extrait de Alice lors du Live à Bercy.


Julie Snyder : (sur un extrait du clip Pourvu qu'elles soient douces, la scène de la poursuite à cheval) Mylène, dans vos clips, vous prenez beaucoup de risques : vous faites les cascades, vous galopez à cheval, vous êtes attachée sur des trains. Est-ce que vous vous êtes déjà blessée ?
Mylène Farmer : Brûlée deux fois, sur le train (clip XXL, ndlr), et pendant le dernier clip (Souviens-toi du jour, ndlr), il y avait du feu à proximité et il faisait très, très chaud. Probablement des bleus, oui (sourire). Je suis quelqu'un de très physique. J'aime ça. J'aime cette prise de risque.


Julie Snyder : Est-ce que vous aimez souffrir ?
Mylène Farmer : D'une certaine manière, oui, certainement. Certainement.


Extrait du clip Je t'aime mélancolie (quand Mylène reçoit de nombreux coups de poing).


Julie Snyder : Vous partagez votre vie avec un singe qui s'appelle E.T. (sourire de Mylène). Comment ça s'est passé ? Est-ce que vous vous êtes levée un matin en vous disant : "Tiens, aujourd'hui, je vais me procurer un singe" ?
Mylène Farmer : Je crois que ça s'est passé comme ça. J'avais envie d'un animal, et je suis allée dans les magasins qui, malheureusement, vendent des animaux et je suis tombée sur cette petite fille. (sourire)


Julie Snyder : Et vous l'avez vue tout de suite, comme ça ?
Mylène Farmer : Immédiatement. C'est tentant d'avoir un singe. (sourire)


Julie Snyder : Oui ? (Mylène confirme) C'était un coup de foudre ?
Mylène Farmer : Oh oui, total ! (sourire)


Julie Snyder : Instinctivement, on sait comment élever un chien ou un chat, mais est-ce que instinctivement, vous saviez quoi faire avec le singe ?
Mylène Farmer : Oui. J'ai dû être singe dans une autre vie donc ça a été très facile (rires).


Julie Snyder : Vous croyez à la réincarnation ?
Mylène Farmer : J'aime cette idée, elle est très poétique.


Julie Snyder : Et qu'est-ce que vous voudriez être dans une autre vie ?
Mylène Farmer : Ben puisqu'on ne peut pas être un animal, c'est forcément un humain. Maintenant... peu m'importe. Vivons celle-ci !


Extrait du clip Je te rends ton amour.


Julie Snyder : Vous êtes proche de Salman Rushdie pour qui, en quelque sorte, le monde est une prison (Mylène confirme). Et vous, vous avez déjà dit : "Parfois, je me sens enterrée vivante". Est-ce que vous avez l'impression que votre liberté, à vous aussi, vous échappe ?
Mylène Farmer : Parfois. Mais je ne suis pas sûre que ce soit le monde environnant qui m'impose ça ; je crois que c'est moi toute seule effectivement. Et quant à Salman Rushdie (la couverture de son livre polémique Les versets sataniques apparaît à l'écran), c'est quelqu'un de très gai dans la vie qui a beaucoup d'humour.


Julie Snyder : Est-ce qu'il vous communique cet humour ?
Mylène Farmer : Oh oui totalement ! On a de grands éclats de rire ensemble (sourire).


Julie Snyder : Qu'est-ce qui vous attirait chez lui ? Pourquoi vous avez eu envie d'aller vers lui ?
Mylène Farmer : Parce que c'est quelqu'un de charismatique. Parce que c'est un grand écrivain - je n'ai pas tout lu ses livres (sic), mais certains. Et puis parce que ce qu'il a vécu est quelque chose qui m'a profondément touchée. Et j'avais envie... Voilà, il s'est trouvé qu'on s'est rencontrés lors d'une soirée ; je suis allée spontanément vers lui parce que j'avais envie de le connaître.


Julie Snyder : On vous sent moins sombre qu'avant ?
Mylène Farmer : (silence et haussement d'épaules) Ça, je suis pas sûre que je puis répondre à une question comme celle-là. Je... (silence) Je crois qu'on a tous... (silence) ses ombres. Donc je les porte en moi, et je les porterai jusqu'à la fin de mes jours. (silence) Je crois qu'on apprend aussi avec la vie, avec le temps, ses expériences. Là encore, tenter que de laisser ses fardeaux de côté parfois, mais maintenant, ça resurgit tellement vite.


La fin de l'entretien se fait avec Désenchantée en fond sonore.


Julie Snyder : Votre plus grand hit, ou en tout cas un de vos plus grands hits, c'est Désenchantée. (Mylène confirme) Qu'est-ce qui vous enchante ?
Mylène Farmer : La gentillesse. La générosité. (silence) Toute forme d'art : la peinture, la littérature, le cinéma... Et puis... (silence) Beaucoup de choses. Le voyage ; j'aime voyager.


Julie Snyder : Merci beaucoup.
Mylène Farmer : Merci à vous... d'avoir souffert avec moi (rires).


Julie Snyder : Oh oui j'ai souffert autant que vous ! Il y avait une belle réciprocité dans la souffrance (rires).


Les deux femmes se lèvent. L'interview se termine sur la toute dernière image du DVD Live à Bercy, quand on voit Mylène dans les coulisses, après sa sortie de scène - le tout sur la musique de Désenchantée.



Source retranscription : Inside Of Mylène Farmer - Référentiel des TV - Edition Why Not  - 2007


Recherche Interviews

Rechercher dans les interviews
de Mylène Farmer