Foto Music : Son
enfance
Mylène Farmer : Je garde de cette époque de
vagues souvenirs enneigés.
Il y a toujours eu une tendance artistique dans la famille. Mon
grand-père était sculpteur et ma
grand-mère se
passionnait pour le théâtre et la peinture. Moi,
quand
j'étais petite, j'avais, et j'ai toujours, un grand amour
pour
les chevaux. A douze ans j'avais décidé d'en
faire mon
métier. J'ai passé plusieurs concours, jusqu'au
moment
où j'ai compris que la pratique seule ne suffisait pas. Il y
avait aussi le côté pédagogique... Et
malheureusement, ça ne correspondait pas à ma
nature.
Alors, j'ai bifurqué, abandonnant la direction chevaline.
Foto Music : Et
comment es-tu passée de l'équitation à
la chanson ?
Mylène
Farmer : J'ai commencé
par exercer
plusieurs petits jobs qui me permettaient de suivre des cours de
théâtre. Cela m'a été
extrêmement
bénéfique, car c'est en travaillant des auteurs
tel
Strindberg que m'est venu le goût de la lecture: ce fut une
révélation. Adolescente, je lisais peu.
Aujourd'hui, je
lis de plus en plus. C'est de là également que
m'est venu
l'amour des mots. J'ai écrit toutes les chansons, ou
presque, d'Ainsi soit
je..., l'album qui vient de paraître.
Foto Music :
Tes clips Libertine
et Tristana pour
ne citer qu'eux, sont à
chaque fois un éblouissement. Que
représentent-ils pour
toi ?
Mylène Farmer : Mes clips sont pour moi un
véritable
enchantement, une espèce de miroir. La vie de tous les jours
m'ennuie, me fait même un peu peur. L'imaginaire est
essentiel
pour sortir de cette morosité, et c'est là que
les
vidéos jouent un rôle important.
Foto Music : Tu
viens de dire que la vie de tous les jours t'effraie. Comment vis-tu ?
Mylène Farmer : Chez moi. Dans une prison
dorée... J'ai
de plus en plus de difficultés à me promener dans
la rue.
Je déteste aller au restaurant, sortir le soir, mais en
même temps je ne pourrais pas un seul instant envisager
d'aller
vivre à la campagne. J'ai besoin d'être au centre
de tout
ce qui se passe. Au même titre, je n'aime pas les vacances.
J'ai
toujours peur de rater quelque chose quand je pars. Mais il ne faut pas
en déduire pour autant que je suis la fée du
foyer ! Je
ne sais pas faire la cuisine par exemple ! Si j'aime tant ma maison
c'est peut-être parce que j'y habite mes deux amours...
Foto Music : Deux
amours ? Raconte !
Mylène Farmer : Non, non, je n'ai pas d'enfants
cachés,
ni de maris secrets. J'ai deux singes, des sapajou-capucins ! La
mère s'appelle E.T, et le bébé, qui
n'a que cinq
mois, s'appelle Léon. Ils vivent dans une grande cage et le
soir, avant de me coucher, je les installe dans un couffin. C'est
probablement à cause d'eux que je n'aime pas trop m'absenter
de
chez moi, ça me culpabilise de les laisser seuls ! A part
mes
singes, j'aime les fringues. J'adore marier les couleurs. Je ne fais
pourtant aucune folie par rapport à l'argent, sans doute
à cause de l'éducation que j'ai reçue.
Acheter une
paire de chaussures reste encore pour moi un instant magique. Je
déteste le gaspillage, et puis surtout j'ai peur
d'être
blasée par le fric !
Foto Music : Au
début de
notre conversation, tu disais qu'après avoir pris la
décision de changer de carrière, en abandonnant
ton envie
de consacrer ta vie à l'équitation, tu avais
suivi des
cours d'art dramatique. En regardant tes clips, on
s'aperçoit
tout de suite que tu es parfaitement à l'aise devant les
caméras. Tu n'es pas tentée par le
cinéma ?
Mylène Farmer : Ce n'est pas que je ne sois pas
tentée
par le cinéma, mais en fait, il y a un seul film
que
j'aurais aimé tourner, c'est "La fille de Ryan", le seul et
unique rôle dont j'aurais rêvé.
C'était, je
trouve, le film le plus extraordinaire qui soit. Malheureusement il est
déjà fait... De toute façon, on verra
bien ce que
l'avenir me réserve.
Foto Music : Quels
sont les défauts et les qualités que tu
apprécies le plus chez quelqu'un ?
Mylène Farmer : (Mylène
réfléchit
longuement avant de se confier). En ce qui concerne les
qualités, ça me semble évident:
droiture et
intégrité. Mais en revanche pour les
défauts,
c'est un peu plus complexe. Bien entendu le mensonge et la
malhonnêteté me font horreur. Mais je crois quand
même que ce qui me gêne le plus, c'est de me
trouver devant
quelqu'un dont j'ai l'impression qu'il n'a pas d'âme, si tu
vois
ce que je veux dire. Le creux, l'inconsistance.
Foto Music :
Revenons en un peu
à la musique. Dis-nous Mylène ce que tu aimes
écouter quand tu es tranquillement chez toi, dans ta prison
dorée si tu préfères !
Mylène Farmer : J'écoute beaucoup de musique
classique et
j'adore les bandes originales des musiques de films. On en revient une
fois de plus, je crois, à l'imaginaire ? Mais il y a
également des chanteurs que j'apprécie beaucoup
et dont
je ne me lasse pas. Renaud, Kate Bush, Serge Gainsbourg par exemple, ou
encore Jacques Dutronc. En ce qui le concerne j'avoue avoir une petite
préférence pour le Dutronc d'hier, par rapport au
Dutronc
d'aujourd'hui...
Foto Music :
Peut-on savoir quels sont tes projets pour les mois qui suivent ?
Mylène Farmer : Pour l'instant je suis en pleine promotion
et cela m'occupe à temps plein. D'autant plus que l'album Ainsi soit je... a
reçu un accueil formidable, ce qui me fait un
énorme plaisir. Donc pas de vacances ! Mais cela ne me prive
guère, comme je te l'ai déjà dit.
Pourtant j'aimerais quand même voyager pour
découvrir certains pays. L'Inde par exemple,
particulièrement, j'adorerais y aller un jour. On verra plus
tard ! Aujourd'hui tout va bien comme ça. Je suis ainsi
faite que je préfère travailler plutôt
que me reposer... alors je suis comblée. Je suis d'un
naturel optimiste, j'ai confiance.