Mylène
Farmer à accordé des interviews à
plusieurs radios fin novembre - début décembre
2010 avant la sortie de l'album
Bleu Noir.
L'interview pour Radio FG a été
réalisée par Antoine Baduel dans une suite de
l'hôtel Park Hyatt à Paris et diffusée
le lundi 06 décembre 2010 (jour de la sortie de l'album)
dans l' "Happy Hour" entre 19h et 20h.
Radio FG : Vous sortez le 06
décembre 2010 votre nouvel
album Bleu Noir.
Et premier enseignement, vous avez
travaillez avec un nouveau producteur très talentueux, Red
One. Pourquoi l’avoir choisi ? Qu’est ce qui vous
séduit dans son style ?
Mylène
Farmer : J'ai rencontré
RedOne grâce à Pascal Nègre. Et,
à un moment donné, ils ont parlé de
moi, et, Pascal a compris que RedOne écoutait et
appréciait ma musique. Et puis, nous avons
conversé tous les deux et je lui ai demandé si il
était possible de rencontrer ce fameux RedOne. (Rires.) Et,
nous nous sommes rencontrés. Et, c'est quelqu'un de
chaleureux, d'enthousiaste. Et puis, pour répondre donc
à la deuxième question, j'aime les sons de
RedOne, j'aime l'efficacité de ses mélodies,
j'aime l'idée que c'est un artiste qui peut aller aussi bien
vers une Lady Gaga mais qui va aussi travailler avec U2 et puis avec
moi et puis d'autres. Donc, c'est quelqu'un qui est, j'allais dire, qui
a certainement une générosité en lui,
mais qui est curieux en tout cas de l'autre et des univers musicaux qui
sont tous différents les uns des autres
Radio FG : Est-ce un
nouveau producteur pour un nouveau son
Mylène
Farmer ? Est-ce que vous vouliez une production plus
« dance
» que les précédentes ?
Mylène
Farmer : C'est toujours difficile
pour moi de cataloguer cet album mais c'est vrai qu'en me dirigeant
vers des compositeurs tels que Moby qui est lui-même
à la naissance de l'électro, d'autre part
Archive, qui lui, c'est encore un autre univers, lui, qui
dissèque le côté sombre de
l'âme et qui a des envolées comme ça
lyriques... D'abord, j'aime l'électro pour en
écouter moi-même, j'aime beaucoup,
j'écoute très très souvent Massive
Attack, j'aime Air, j'aime aussi d'autres musiques, j'aime Muse, j'aime
Sigur Rós, j'aime Depeche Mode. J'ai
été élevée finalement,
j'allais dire 'élevée', non pas, mais, quelqu'un
proche de moi qui, très petit écoutait
énormément de musique et une
bibliothèque fantastique de vinyls d'abord et puis
aujourd'hui de cd et, j'ai écouté ça
en boucle, donc, c'était les Blancmange, les Sorcel (?),
Depeche Mode et, évidemment, des milliers d'autres.
Radio FG : On parlait de
Moby, et on se souvient de votre duo Slipping Away.
Comment se sont passées ces
retrouvailles musicales ?
Mylène
Farmer : Retrouvailles
musicales... Moby, c'est quelqu'un que j'ai toujours
apprécié comme je disais
précédemment, c'est quelqu'un qui,
après notre duo, nous avons essayé de ne pas nous
perdre, non pas de vue, parce qu'il habite très loin mais,
nous correspondons par mails et, Moby, parce que justement nous ne nous
perdons pas de vue, un jour, m'a envoyé un cd avec
près de dix-sept titres de maquettes de ses chansons et m'a
dit : "Prends ce que tu veux si tu en as envie". Et, j'avoue que je ne
me suis pas fait prier et, j'en ai choisi six. Et, c'est quelqu'un qui,
lui aussi a cette générosité commune
d'avec RedOne d'ailleurs, qui lui m'a dit: "Fais ce que tu veux avec
les chansons, si tu veux changer même les
mélodies, la production" et, j'ai peu changé
finalement la production parce que je voulais préserver
l'âme de ces chansons justement. Il y a quelque chose
d'immédiat chez Moby je trouve qui est à la fois
nostalgique et à la fois dynamique. Et, j'ai voulu
préserver ce que moi j'avais découvert au travers
de ces maquettes et puis, après, j'ai apporté ma
patte.
Radio FG : Votre musique
est traditionnellement marquée par
la
mélancolie et vos concerts par une énergie
incroyable. Est-ce que cet album reflète une nouvelle fois
ces deux aspects de votre personnalité ?
Mylène
Farmer : Oui , je pense qu'il y a
encore d'autres facettes, j'imagine, qui sont présentes ou
à découvrir. Mais, ça fait partie bien
sûr de ma personnalité et, il y a l'aspect sombre,
il y a l'aspect mélancolique, l'aspect plus joyeux, plus
gamine, mais, là encore, je pense que nous sommes peu ou
prou tous les mêmes avec des failles, avec des
éclats de rire. La vie, quoi...
Radio FG : Votre
single Oui
mais... non a
été remixé par un jeune artiste
français, Jérémy Hills. Avez-vous
écouté ce remix et qu’en avez-vous
pensé ?
Mylène
Farmer : Bien sûr que
oui. J'ai entendu parler de ce jeune homme puisqu'il est effectivement
très, très jeune par un ami commun et, comme il
savait que j'étais à la recherche justement de
nouveaux remixeurs, parce qu'il est toujours tentant d'aller puiser
vers les personnes et connues, et reconnues... mais, moi, ça
me met en joie que d'aller aussi vers des personnes qui sont plus...
bien qu'il ait fait quelque chose d'assez remarquable, cet
été avec Beyonce je crois, un remix qui a
très, très bien marché,
néanmoins peu connu, je crois, du grand public.
Et, donc, j'ai dit: "Fonçons" et, j'ai évidemment
écouté et apprécié. J'en
suis très, très heureuse.
Radio FG : Beaucoup de
vos tubes ont été
remixés et cela prouve
l’intérêt que peuvent porter des DJs
pour votre carrière, votre musique.
Certains artistes se
sentent un peu dépossédés quand on
remixe un de leurs titres. Est-ce votre cas ?
Mylène
Farmer : Dans la mesure
où nous allons vers eux, c'est déjà un
souhait. Mais, parfois, ça peut se terminer par une mauvaise
ou une bonne surprise. Ce n'est pas bien à tous les coups.
On peut éventuellement intervenir en cours de production, de
re-production. Ce que je n'aime pas, c'est quand un remixeur va
complètement, effectivement, enlever totalement
l'âme de la chanson. J'aime bien qu'il s'approprie la chanson
mais pas la rendre totalement étrangère.
Radio FG : En dehors du
single Oui
mais... non -
1er
extrait de l’album – on a également
découvert le titre Leila,
composé par Moby (en fait, composé par Archive,
ndlr) et qui parle d’une jeune
iranienne. Que pouvez-vous nous dire sur cette chanson ?
Mylène
Farmer : Là, il s'agit
d'une rencontre d'il y a quelques années. J'ai
rencontré donc sa maman qui fut la femme du shah d'Iran.
Mais, ce n'est pas tant ça qui m'intéressait et
qui m'a émue, c'est plus l'histoire qu'elle m'a
raconté puisque sa fille s'est donnée la mort,
s'est suicidée et, elle me confiait qu'elle
écoutait beaucoup ma musique. Ce qui, fatalement, me touche.
Et puis, indépendamment de ça, c'était
parler d'une femme d'un autre pays. Et, j'ai récemment revu
sa maman, lui ai présentée et la chanson, et la
vidéo qui est réalisée par Alain
Escalle et, j'avoue que c'était un moment
d'émotion intense.
Radio FG : La promotion
de ce nouvel album est sensiblement
différente des précédents. Cette
fois-ci, en effet, vous avez lancé un site web
éphémère où l’on
trouve des extraits, des clips. Pourquoi ce choix là ? Vous
avez le sentiment qu’internet a changé la donne
pour les artistes ?
Mylène
Farmer : Certainement. C'est vrai
qu'internet s'impose à nous qu'on le veuille ou non.
Après, c'est vrai, je faisais partie sans doute de ces gens
un peu réfractaires. J'ai mis du temps à m'y
mettre si je puis dire mais, j'avoue aussi que c'est quelque chose
d'assez ludique. Ça m'a permis effectivement de
créer le désir parce que je crois que
c'était surtout ça pour moi qui était
important, c'est de ne pas en effet tout dévoiler parce que
j'aime l'effet de surprise. De même que j'aime qu'on me fasse
des surprises. Maintenant, j'ai pensé à ce site
éphémère et, parce qu'il est
éphémère, c'est ce pour quoi il m'a
séduite aussi. Et l'envie, effectivement, de distiller comme
ça des petites gouttes, donner l'envie tout simplement.
Radio FG : Bleu Noir
est votre 9e album (il s'agit en fait de son huitième album
studio, ndlr) et, depuis vos
débuts vous êtes fidèle à la
même image, au même univers. Qu’est ce
qui nourrit aujourd’hui votre musique,
l’écriture de vos chansons ?
Mylène
Farmer : Ce sont des instants de
vie, ce sont des émotions, ce sont mes propres histoires. Je
ne crois pas qu'il y ait de recettes finalement. J'ai l'impression,
aussi, finalement d'écrire un peu toujours la même
chanson en ce sens qu'il y a des thèmes
récurrents. Voilà, c'est tenter de se livrer un
petit peu.
Radio FG : La sortie
d’un nouvel album met toujours en trance
vos
fans ! C’est un évènement, tout autant
que vos concerts. Alors prévoyez-vous une tournée
l’an prochain pour promouvoir cet album ? Des Stades de
France ?!
Mylène
Farmer : Ecoutez, pour l'instant,
sincèrement, rien ! Parce que l'album a
déjà demandé beaucoup
d'énergie et de travail. La scène, là
encore, c'est un moment que je préfère rare mais,
dans le sens qualificatif du terme. C'est d'abord beaucoup, beaucoup de
travail en amont. C'est plus d'un an de travail. Pour l'instant,
voilà, je suis concentrée sur cet album et sa
sortie. Dans le futur, il y aura une scène. J'ai
très envie de remonter sur scène, ça
me manque. Mais, ce n'est pas pour l'instant, en tout cas.