Présentation
de l'interview par une voix off : Tous les
mois, une personnalité nous parle en toute
liberté de sa vie intime. Mylène Farmer nous dit
tout, tout, tout.
Monique Chouraqui :
(bien qu'assise face à Mylène, la
journaliste n'apparaît pas à
l'écran si ce n'est parfois
partiellement de dos) Est-ce que vous prenez des initiatives en amour ?
Mylène
Farmer : Celles de
choisir. J'aime séduire avant tout. Et,
posséder... peut-être dans un second temps.
Monique
Chouraqui : Vous parlez avec les hommes avec qui vous avez une
relation sexuelle ?
Mylène Farmer : Un peu. Il faut agir plus que
parler. (rires) J'aime bien le toucher, j'adore.
Monique
Chouraqui : Vous préférez faire
l'amour en silence ?
Mylène
Farmer : Le
regard...
Monique
Chouraqui : Vous n'aimez pas qu'on vous
parle ?
Mylène
Farmer : Non. Parler,
c'est pour construire l'avenir.
Monique
Chouraqui : Vous pourriez imaginer une scène
d'amour idéale pour vous ?
Mylène
Farmer :
L'ascenseur, j'aime bien.
Monique
Chouraqui : Faire l'amour dans l'ascenseur ?
Mylène
Farmer : C'est
vous qui le dites ! (rires)
Monique
Chouraqui : Ça se passe très vite, on se
quitte sans se dire au revoir et, sans se dire un seul mot...
Mylène
Farmer :
Peut-être...
Monique
Chouraqui : ... et on fait l'amour sans se
parler.
Mylène
Farmer : Voilà.
Monique
Chouraqui : Il vous est arrivé de passer plusieurs
mois sans faire l'amour, plusieurs semaines ?
Mylène
Farmer : Oui, toute mon
adolescence, toute mon enfance.
Monique
Chouraqui : Et vous l'avez vécu comment ?
C'était difficile ? C'était
une frustration ?
Mylène
Farmer : C'est
quelque chose que, je crois que j'ai
appréhendé et que j'ai
occulté et dont j'ai eu horreur aussi avant de le
connaître, et même, un peu après.
Monique
Chouraqui : Vous vous souvenez de la première fois
? Vous voulez le raconter ?
Mylène
Farmer : La
première fois... Je crois, contrairement
à beaucoup de personnes, c'est un moment
plutôt certainement décisif dans la
continuité, quelque chose de laborieux, de difficile.
C'est quelque chose de très fragile,
voilà. C'est à dire qu'on ne
connaît pas, que personne ne maîtrise.
Monique
Chouraqui : Ça s'est passé
comment ?
Mylène
Farmer : Une
chambre... Une chambre banale, un lit même pas
douillet... Une chose incroyable. C'est un peu un
viol. Le viol de l'enfance... un peu le viol de
l'imaginaire.
Monique
Chouraqui : La fin de l'innocence...
Mylène
Farmer : C'est
un peu ça. C'est quelque chose après
qu'on reconstruit, mais, c'est vrai que ça a
été un peu un film de Walt Disney qui... qui
s'en va.
Monique
Chouraqui : Un souvenir désagréable, la
première fois ?
Mylène
Farmer : Pas
désagréable, parce que, c'est moi qui
suis allée vers ça donc, j'ai voulu les
choses. Maintenant, je maîtrise beaucoup plus, et puis je
vais vers ces choses avec un peu plus de vice.
Diffusion d'un extrait du clip Libertine
Monique
Chouraqui : Quelles sortes d'hommes vous attire ?
Qu'est-ce qui vous trouble chez un homme ?
Mylène
Farmer : Je crois que
ça a été de tous temps les gens qui
ont une existence sociale. C'est-à-dire que ça
peut être du domaine de la littérature, politique,
chanson, autant d'arts qui existent.
Monique
Chouraqui : Quelqu'un qui détient le
pouvoir, une forme de pouvoir ?
Mylène
Farmer : Un certain
pouvoir, une forme de pouvoir.
Monique
Chouraqui : De vous sentir dominée ?
Mylène
Farmer : La domination,
elle peut s'effectuer effectivement quand il s'agit
de plaisir.
Monique
Chouraqui : Elle peut s'effectuer physiquement aussi
? Vous aimez être dominée quand vous faites
l'amour ?
Mylène
Farmer : Une certaine
domination, oui.
Monique
Chouraqui : Vous aimez la violence ?
Mylène
Farmer : Je vous parlais
de viol, j'avoue que c'est... mais là
aussi il faut aller doucement quand même parce que
c'est quelque chose de grave... mais c'est vrai que
le viol a quelque chose de très excitant et d'assez
incroyable.
Monique
Chouraqui : Vous avez besoin d'avoir mal, ou besoin
de faire mal, pour éprouver du plaisir ?
Mylène
Farmer : J'ai
besoin de faire mal et j'ai besoin d'avoir mal, oui.
Monique
Chouraqui : Pour parvenir au plaisir.
Mylène
Farmer : Oui, oui. Je
veux bousculer, je veux...
Monique
Chouraqui : Vous n'aimez qu'un homme qui
vous fait souffrir, vous ne pouvez aimer qu'un homme qui vous
ferait souffrir.
Mylène
Farmer : Si on veut un
peu schématiser, aller vite, ça serait un peu
ça. La facilité, les choses évidentes
ne sont pas intéressantes.
Monique
Chouraqui : Vous pouvez vivre plusieurs histoires
d'amour en même temps ?
Mylène
Farmer : Oui.
Monique
Chouraqui : Les hommes concernés le savent, les
hommes de votre vie ?
Mylène
Farmer : Si
j'avais à choisir ma vie et c'est
là que réside la chose la plus difficile,
c'est peut-être la... comment appelle-t-on
ça ? On dit bigame ? Mais peut-être
multiplié par quatre ! C'est avoir trois, quatre
hommes dans ma vie. Si j'avais une métaphore
à faire, je prendrais volontiers la mante religieuse.
C'est-à-dire que, si j'en avais le pouvoir parce
que bon, je ne suis pas encore tombée dans la folie totale,
mais je crois que je couperais la tête volontiers.