Mylène Farmer - Interview - Télé Magazine - 09 août 1986
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Date09 août 1986
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Média / PresseTélé Magazine
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Interview parLaurence de Wit
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Fichiers
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Catégories interviews
Laurence de Wit : Mylène, vous êtes née au Canada ?
Mylène Farmer : Oui, en 1961. J'y ai vécu jusqu'à l'âge de huit ans et ensuite je suis venue en France. Mon père était ingénieur des ponts et chaussées, il était parti au Québec pour participer à la construction du barrage du Manicouagan.
Laurence de Wit : Vous n'aimez pas votre enfance ?
Mylène Farmer : Je n'en ai aucun souvenir, ce qui veut dire qu'effectivement je n'aime pas cette période de ma vie. Je me sens plus à l'aise avec les gens plus âgés que moi. Les enfants ne m'intéressent pas, ils sont trop naïfs, trop inconscients et ça me fait peur.
Laurence de Wit : Depuis combien de temps chantez-vous ?
Mylène Farmer : J'ai arrêté mes études en terminale, à dix-sept ans. J'étais attirée par les métiers artistiques, par la chanson surtout qui me paraissait plus accessible que le cinéma. Et puis par hasard j'ai rencontré Laurent Boutonnat qui est compositeur et on a eu envie de travailler ensemble il y a deux ans. Ça a donné ma première chanson Maman a tort qu'il avait écrite avec un autre producteur. Ils ont procédé à un casting et j'ai été choisie. Jusque-là j'avais suivi des cours de théâtre et j'avais été mannequin, et aussi travaillé dans la mode et la publicité.
Laurence de Wit : Quelle qualité vous séduit le plus chez les gens ?
Mylène Farmer : La pudeur. Et ça ne va pas à l'encontre de la provocation qui m'est nécessaire pour m'exprimer. Je suis née pessimiste, mais j'aime tout ce qui est extrême, je suis passionnée et romantique, et le métier que je fais me convient parfaitement, il se passe toujours quelque chose, je ne m'ennuie jamais.
Laurence de Wit : Toute votre vie est axée sur votre carrière ?
Mylène Farmer : En ce moment, forcément oui, parce que je débute. Mais je ne voudrais pas oublier le reste. Je ne sais pas encore si c'est possible ou non. Je ne lis plus, je ne peins plus, je peignais à la gouache des insectes, des animaux bizarres. Mon seul compagnon c'est E.T. un singe capucin que j'ai acheté en me promenant sur les quais il y a deux ans.
Laurence de Wit : Vous avez d'autres animaux ?
Mylène Farmer : Non, mais j'aime les félins pour leur beauté et leur grâce et si je n'habitais pas dans un appartement, j'aurais un loup, un de ces grands loups blancs et gris que j'admire pour leur nature sauvage et craintive en même temps.
Laurence de Wit : Votre chanson et votre clip Libertine se situent au XVIIIè siècle, pourquoi ?
Mylène Farmer : Le XVIIIè siècle est le siècle du libertinage, c'est-à-dire un doux mélange de décadence et de folie. C'est une certaine naïveté, une quête du bonheur par les plaisirs. Il me semble que les gens étaient plus heureux à cette époque-là.
Laurence de Wit : Quels vêtements aimez-vous porter ?
Mylène Farmer : Je suis très à l'aise dans ces vêtements du XVIIIè siècle justement, mais bien sûr, je ne peux pas m'habiller comme ça dans la vie quotidienne. D'un autre côté, la mode ne m'intéresse pas. J'aime porter des choses sophistiquées que je découvre au hasard des boutiques.
Laurence de Wit : Pensez-vous faire bientôt de la scène ?
Mylène Farmer : Je ne suis pas encore prête. Je suis perfectionniste et avant de faire un spectacle en direct, je veux encore travailler. Pour le moment, je vais me reposer un peu, je vais rester à Paris, lire, aller au cinéma, les vacances quoi ! En septembre prochain, je sors un nouveau 45 tours que je commence déjà à préparer. Les chansons seront dans la lignée des précédentes, elles seront le reflet de ce que j'aime : l'humour, la provocation et une atmosphère entre l'innocence et la perversité.