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Mylène Farmer - Interview - Du côté de chez Fred - Antenne 2 - 07 novembre 1988



  • Date
    07 novembre 1988
  • Média / TV
    Du côté de chez Fred
  • Interview par
    Frédéric Mitterrand
  • Fichiers
  • Catégories interviews



Mylène Farmer est l'une des invitées de cette émission diffusée l'après-midi et présentée par Frédéric Mitterrand. Elle est entourée par des cinéastes dont le russe Sergei Paradjanov. Elle répondra à quelques questions avant d'intepréter en fin d'émission la chanson Puisque.


Frédéric Mitterrand : Il y a un événement, c'est la sortie du clip de Mylène Farmer. Mylène Farmer est certainement une des personnalités les plus intéressantes du show-business français. Elle a un univers extrêmement fort, construit avec énormément de qualité et son clip fait figure d'événement dans le monde du clip. Je voulais que Mylène Farmer soit présente en face de deux génies du cinéma (Alexandre Trauner et Sergei Paradjanov, ndlr), de manière à ce qu'on puisse confronter son univers et le leur, elle qui commence.


Frédéric Mitterrand s'entretient alors avec les deux cinéastes avant de revenir vers Mylène.


Frédéric Mitterrand : Mylène Farmer a un parcours tout à fait singulier dans la chanson et dans le cinéma français. Elle fait des clips, et des clips qui sont très longs, qui sont complètement hors des normes et qui sont tout à fait remarquables, avec Laurent Boutonnat. Je voulais demander à Mylène Farmer quand elle vient d'entendre Alexandre Trauner et Sergei Paradjanov : toutes proportions gardées, Mylène Farmer, vous êtes aussi une solitaire dans la chanson française. Qu'est-ce que vous retirez comme impression de ce que vous les avez entendus dire ?
Mylène Farmer : Beaucoup d'humilité de ma part. Je pense que ce sont des personnes qui ont souffert beaucoup plus que moi. C'est vrai que moi j'ai un tempérament qui est très solitaire. D'autre part, je suis très émue parce que moi-même j'ai tenté d'apprendre la langue russe et que pour moi le plus beau cinéma, c'est le cinéma russe. Je l'ai découvert au travers de Tarkovski, Elem Klimov et j'ai hâte de découvrir les films de ce metteur en scène (Sergei Paradjanov, ndlr) et je suis très émue...


Frédéric Mitterrand : Et pourquoi, Mylène, imposer - ça doit être très difficile - ce format par exemple de clips qui sont comme de véritables films ? On va voir, malheureusement, un extrait trop court du clip ; et puis, Mylène devait chanter pour nous et puis on a perdu du temps sur cette émission - du moins on nous en a retiré -  malheureusement, Mylène ne pourra pas chanter, donc on verra simplement un extrait du clip (Mylène ne chantera pas Pourvu qu'elles soient douces mais interprètera Puisque en fin d'émission, ndlr). Mais vraiment, l'univers de Mylène Farmer est très, très fort et très, très cohérent. Pourquoi est-ce que...
Mylène Farmer : (coupant Frédéric Mitterrand) Je dirais la première réponse : par amour pour le cinéma, qui est commun à Laurent Boutonnat et à moi-même. Et d'autre part, surtout pour s'échapper de la réalité, de tout ce que peut être le quotidien. Le rêve, avoir un besoin d'imaginaire, de vivre et de survivre.


Frédéric Mitterrand : Mais les maisons de disques doivent être réticentes, ou les producteurs doivent être réticents à faire un clip de 17minutes... en scope ?
Mylène Farmer : Vous savez, nous avons beaucoup investi dans ce clip et dans tous les clips précédents. Et, c'est vrai que moi j'ai une philosophie : je préfère manger des pâtes tous les jours et pouvoir m'offrir ce genre de choses, de cinéma.


Frédéric Mitterrand : Alors on regarde le clip.


Diffusion d'un extrait du clip Pourvu qu'elles soient douces.


Frédéric Mitterrand : Malheureusement, on a eu juste une minute du clip, mais, Mylène ce clip je le trouve si bien, on va faire tout un truc autour, c'est-à-dire on va faire toute une émission autour et autour du principe que ce clip dure 17minutes, c'est-à-dire qu'il se regarde véritablement comme un film (à notre connaissance cette émission ne s'est jamais faite, ndlr). Je voulais juste vous demander comment est-ce que vous avez organisé le travail sur le clip ?
Mylène Farmer : Je crois de la même façon qu'on peut organiser un travail sur un long-métrage avec la même rigueur, les mêmes exigences. C'est vrai qu'on fait appel à des décorateurs, que c'est des choses fondamentales que d'avoir un très bon décorateur, que d'avoir un très bon chef opérateur, que de construire un scénario. D'autre part, nous avions aussi un conseiller artistique... un conseiller historique, lapsus ! (rire)


Frédéric Mitterrand : Alors, vous avez une relation très, très forte avec Laurent Boutonnat. C'est-à-dire que c'est toujours les mêmes gens avec qui vous travaillez.
Mylène Farmer : C'est vrai. Mais ça, c'est des choses aussi qui sont essentielles, je crois, dans la vie d'un artiste, c'est d'avoir une équipe solide et puis, des univers communs. C'est pourquoi je continue avec Laurent Boutonnat, avec Bertrand Le Page et puis la maison de disques, bien sûr.


Frédéric Mitterrand s'entretient ensuite avec du'atres invités.


Frédéric Mitterrand : Mylène Farmer, vous qui n'êtes pas du tout horrible dans le clip du XVIIIème siècle mais qui êtes au contraire absolument ravissante, pourquoi est-ce que cet univers du XVIIIème siècle semble vous fasciner ?
Mylène Farmer : Je dirais d'abord on a voulu faire la suite de Libertine, donc c'est peut-être aussi le propos qui était plongé dans le XVIIIème siècle. Pourquoi ? Peut-être parce que je suis un peu passéiste et que j'ai du mal à m'imaginer comme étant un personnage de 88. C'est vrai, j'ai beaucoup de mal. Si j'avais à choisir un film, j'aurais du mal à choisir un film d'aujourd'hui, c'est vrai.


Frédéric Mitterrand : Vous auriez été bien dans Les enfants du paradis (référence au film réalisé par Marcel Carné sur un scénario de Jacques Prévert et sorti en 1945, ndlr) ?
Mylène Farmer : J'aurais bien aimé, c'est vrai ! (rire)